#CSABeyondBorders: Equiterre et l’Agriculture Soutenue par la Communauté au Québec
A quelques semaines de son VIIe colloque international (https://thessaloniki.urgenci.net), Urgenci lance une série #CSABeyondBorders (l’ASC par-delà les frontières). Des articles et des essais écrits par des paysannes, des paysans et des membres de groupes en Agriculture soutenue par les citoyens, des témoignages venant des pionniers du mouvement, des entretiens collectés aux quatre coins du monde, seront publiés d’ici au Colloque. Nous commençons notre tour du monde par l’un des réseaux d’ASC les plus expérimentés, Equiterre au Québec.
Equiterre et l’Agriculture Soutenue par la Communauté au Québec
Par Isabelle Joncas, Chargée de projet d’Equiterre (Photos: Equiterre)
Équiterre est une organisation à but non lucratif qui s’est donné pour mission de proposer des solutions concrètes pour accélérer la transition vers une société où les citoyens, les organisations et les gouvernements font des choix écologiques, sains, et équitables.
Par ses projets d’accompagnement, de sensibilisation et de recherche, Équiterre veut porter l’attention sur les aspects fondamentaux de la vie : manger, se transporter, habiter, jardiner et consommer : des besoins vitaux, mais aussi des moyens à la portée de chacun pour agir de façon responsable et changer le monde un geste à la fois. Car ce sont les individus et les collectivités qui façonnent leur milieu.
L’organisation intervient également sur la scène publique et auprès des décideurs pour que les lois, règlements, politiques ou pratiques favorisent une société́ juste et durable. Historiquement québécois, l’organisme se déploie actuellement pour travailler à l’échelle du Canada.
Le réseau des fermiers de famille ; l’un des projets phares d’Équiterre
Les fermiers qui vendent leur production sous le principe de l’ASC sont appelés au Québec « les fermiers de famille » en référence au médecin de famille qui désigne le praticien proche de tous ses patients. Ce mode de mise en marché existe depuis un peu plus de vingt ans au Québec, et s’est développé sous l’impulsion de fermiers écologistes et visionnaires, et d’Équiterre, organisme alors tout jeune qui a grandi et évolué parallèlement à son réseau de fermiers, en constante augmentation.
La formule de l’ASC prend soin de l’agriculture québécoise, qui aujourd’hui représente à peine 2% de la superficie totale du Québec, essentiellement en grandes cultures conventionnelles (partiellement OGM) en rotations maïs / soya / céréales.
Actuellement, une ferme québécoise disparaît chaque jour.
Dans ce contexte, en 2017, 130 fermes (dont 8 fermes d’élevage) produisaient des paniers de légumes ou de la viande certifiés biologiques ou en voie de l’être, et les vendent via le principe de l’agriculture soutenue par la communauté́, au sein du réseau des fermiers de famille. Nous estimons qu’une cinquantaine de fermes québécoises suit le même modèle de mise en marché sans faire partie du réseau.
Ensemble, les fermes du réseau offrent 19.000 abonnements qui nourrissent plus de 50.000 personnes à travers la province, avec des foyers plus importants autour des deux plus grosses villes Montréal et Québec, pour une population de 8,2 millions de québécois.
Équiterre : une agence de rencontre entre les fermes et leurs abonnés
Afin de soutenir les fermiers dans l’atteinte de leurs objectifs de recrutement d’abonnés, nous mettons en place tout un plan marketing. Concrètement, nous participons à des salons et évènements pour promouvoir le modèle des paniers de légumes, et nous faire les portes-paroles des fermiers, nous faisons imprimer des outils de promotion (dépliants, affiches, autocollants, pancartes,…) que nous mettons à disposition des fermes et travaillons beaucoup avec les réseaux sociaux pour élargir notre communauté. Notre site internet fermierdefamille.com sert de vitrine au grand public en offrant une visibilité à toutes les fermes membres et la possibilité aux abonnés de s’inscrire en ligne auprès d’une ferme.
Les services aux fermes
Afin d’aider les fermiers à produire mieux et à le faire par plus d’échanges entre les fermes d’expérience et celles qui débutent, nous organisons pendant l’hiver des ateliers techniques, et pendant l’été des visites entre fermes pour faire circuler les connaissances et les pratiques.
Aussi, nous réalisons une veille sur les prix des fruits et légumes chaque été́ et chaque hiver, afin d’aider les jeunes producteurs à fixer leurs prix.
Chaque année, nous diffusons une « carte privilège » aux fermes du réseau leur faisant bénéficier de tarifs avantageux auprès de partenaires techniques et de fournisseurs.
Nous fournissons de la documentation et des ressources aux fermes qui intègrent le réseau et les mettons en lien avec un mentor.
Nous travaillons à trouver des points de livraison (ex. en milieu de travail) pour les fermes du réseau et le faisons avec des partenaires importants comme une chaîne de supermarchés où les fermiers de famille sont bienvenus dans les stationnements pour les livraisons, ainsi que des trains de banlieue et la bannière gouvernementale de distribution de boissons alcoolisées (déployée dans la province). Ces partenariats sont développés grâce à la crédibilité de l’organisme et de son réseau d’intervention et ils bénéficient aux fermiers de famille.
Et enfin, nous offrons aux fermiers la possibilité d’utiliser un outil informatisé collectif d’inscription en ligne aux paniers et de gestion, exclusivement conçu pour eux et dont ils sont invités à orienter les améliorations. À l’ère du web et des inscriptions en ligne, c’est un service important pour se démarquer comparativement aux formules de livraisons de paniers qui se développent !
La gouvernance
Les fermes sont impliquées dans les processus décisionnels à travers un organe interne appelé comité de suivi (ou comité aviseur) constitué d’une dizaine de fermiers volontaires. Ce comité se rencontre 2 à 3 fois par an, pour échanger sur les grands enjeux qui peuvent se présenter au réseau, et pour participer à la sélection des nouvelles fermes qui intègrent le réseau chaque année.
Nous travaillons au service de l’agriculture soutenue par la communauté́
Le réseau est géré́ par quatre personnes, salariées d’Équiterre, et il est autofinancé par une cotisation des fermes membres, ainsi qu’une contribution des abonnés reversée par les fermes en fin de saison (un montant fixe par année d’abonnement). Les fermes conservent la main sur les contenus, les formats, et les tarifs d’abonnements qu’elles offrent. Et ce sont elles qui perçoivent directement les paiements de leurs abonnés.
Les mandats de l’équipe du réseau peuvent se résumer comme suit :
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Promotion du modèle auprès du grand public,
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Accompagnement des fermes aux spécificités de la mise en marché en paniers de légumes,
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Représentation auprès du monde institutionnel pour faire valoir la place de l’agriculture de proximité́ et biologique au Québec, et au delà.
Aparté : Des paniers bio québécois à l’année?
La saison de distribution des légumes biologiques et locaux bat son plein durant l’été et l’automne, le climat local ne permettant pas des récoltes à l’année. L’allongement de la saison étant l’une des conditions à la fidélisation, certaines fermes offrent des paniers d’hiver composés de légumes de conservation et de verdures.
Aussi les paniers contiennent essentiellement des légumes, même si certaines fermes maraichères travaillent en partenariat avec des producteurs de petits fruits, d’oeufs, de produits de la ferme transformés ou de produits cultivés en serres,… Nous oeuvrons pour multiplier les partenariats entre les fermes car une offre diversifiée est une garantie de popularité accrue.